Portrait de relieur: Jean Engel (1811 – 1892)

Amis Bibliophiles bonjour,

Certains relieurs du XIXe siècle laissèrent une trace dans l’histoire pour leurs qualités techniques ou artistiques, certains encore pour leur tempérament, leur créativité et leur capacité à innover. Jean Engel (1811-1892) est bien l’un de ceux-ci, puisqu’il a contribué de façon décisive à l’industrialisation progressive de la reliure, tout en jouant un rôle majeur dans l’une des aventures éditoriales marquantes du XIXe siècle, puisque c’est à son atelier qu’est confiée la reliure des Voyages extraordinaires de Jules Verne parus chez Hetzel.

Jean Engel en 1811 à Ebigen dans le Wurtemberg. Après son apprentissage à Tubingen et un passage comme ouvrier en Suisse, il vint en France et travailla d’abord à Dijon, dans l’atelier Maître, avant de se fixer à Paris en 1832 (Fléty). D’abord apprenti chez Kleinhans (au 15 rue Guénégaud, puis au 56 rue Mazarine, où ce dernier fit également travailler Trautz comme ouvrier entre 1830 et 1833 – Engel et Trautz se cotoyèrent donc), Engel travailla ensuite chez Galette (au 41 rue Mazarine, qui était lui même ancien ouvrier de Thouvenin).

Jean Engel rejoint ensuite les ateliers du relieur Schaeck, dont il épousa la soeur. Il sera l’associé de Shaeck entre 1838 et 1851, année où ce dernier se retire.

La chronique du journal générale de l’imprimerie et de la librairie (N°30, 23 juillet 1892) nous apprend que Engel, apprend qu’en 1838, « après par avoir par un travail opiniâtre réalisé un fonds d’économie de 1200 francs, il vint s’établir, comme relieur, dans l’immeuble actuellement occupé par les papeteries du Marais. Grâce à son activité incessante et à ses capacités professionnelles, les affaires prospérèrent, et M. Engel dut songer à. agrandir ses ateliers. ». Il s »installe d’abord au 22 Rue Suger en 1843, puis au 18 rue Visconti, où la vingtaine d’ouvriers occupe vite tout l’immeuble, qui est entièrement consacré à la reliure.

On le constate, Jean Engel est en permanence soucieux d’accroître et d’industrialiser sa capacité de production. En 1863, l’atelier déménage finalement sur un terrain de 3000 mètres carrés acquis par Engel au 91 Rue du Cherche-Midi où il fait construire un vaste ensemble équipé de manière très moderne pour l’époque. L’atelier couvre 900 mètres carrés de plain-pied, auquel furent annexées des galeries d’une étendue de 300 mètres.

Avec son fils Michel, Engel teste des machines à coudre et des machines à plier qui vont lui permettre une nouvelle fois d’accroître sa productivité, et on comptera jusqu’à 450 ouvriers en 1892. Son seul rival est en fait Alfred Mame, qui s’attelle à l’industrialisation de la reliure à Tours.

L’atelier Engel est chargée de la reliure des Voyages extraordinaires de Jules Verne parus chez Hetzel. En 1870il compte 200 ouvriers, à sa mort 450. L’atelier participe à de nombreuses expositions où la qualité de ses travaux est remarquée.

Engel se spécialise dans les cartonnages romantiques dédiés aux livres de prix et d’étrennes, mais également les Jules Verne de la collection Hetzel, célèbres pour leur reliure, le plus souvent, rouge et or. Ces ouvrages sont généralement signées des noms de Engel et de son graveur, Souze.

On croise également quelques reliures signées de la main même d’Engel, qui possédait également un petit atelier de reliure de luxe.

Jean Engel fut décoré de la légion d’honneur le 14 juillet 1891, il fût également président de la Chambre syndicale de la reliure à deux reprises.

Jean Engel est décédé lors de la catastrophe de Saint-Gervais, le 11 juillet 1892, alors qu’il était en villégiature aux Bains, avec près de 200 autres victimes, emportées par un torrent de roches et de boue.

Son fils Michel lui succéda et l’entreprise continua de prospérer malgré un terrible incendie qui détruisit presque entièrement la manufacture de la rue du Cherche-Midi dans la nuit du 19 au 20 novembre 1901.

Les fils Engel maintiennent le cap de la qualité et construisent une usine-modèle. L’entreprise continuera d’être à la tête de la profession et demeurera jusqu’à la fin le symbole de la reliure industrielle haut de gamme.

Entreprise P. et H. Engel. 1931. Photographie de François Kollar (1904-1979). Paris, Bibliothèque Forney.

De 1947 à 1970, l’entreprise Engel à Malakoff, dont le savoir-faire était plus que centenaire, fut le principal relieur du Club français du livre. Lors de la fermeture, vers 1971, Engel employait 250 salariés.

H.

A l’Institut national d’histoire de l’art, dans la collection Jacques Doucet (fonds Pierre Laveran, se trouve un dossier photographique sur l’atelier Engel.

Sources: DEL, Fléty,

PS: malgré mes recherches, je n’ai pas trouvé de portrait de Engel, hélas.

 

7 Commentaires

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  1. Paris bibliophile: la rue Visconti, haut-lieu de la reliure parisienne. – Bibliophilie.com

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