Amis Bibliophiles Bonsoir,
« Vers la fin du mois de septembre 1895, Paul Verlaine (1844-1896), malade et sans un sou, essayait de revendre à des libraires parisiens des volumes dédicacés par ses amis écrivains. C’est chez le libraire Chacornac, quai Saint-Michel, qu’il rencontra un homme de lettres, Paul-Louis Dreyfus Bing (1852-1913), dit Pierre Dauze, très lié avec Anatole France, fondateur de la Revue biblio-iconographique, qui lui proposa de composer une série de 24 sonnets sur des sujets bibliophiliques assez précis : publiés chaque semaine, ils lui seraient payés 10 francs chacun. Après leur publication dans la Revue, les sonnets seraient rassemblés en une plaquette tirée à petit nombre (131 exemplaires). Emporté par la maladie, Verlaine ne put fournir que 13 sonnets.
Voici celui que la Bibliophilie:
« Le vieux livre qu’on a lu, relu tant de fois !Brisé, navré, navrant, fait hideux par l’usage,Soudain le voici frais, pimpant, jeune visageEt fin toucher, délice et des yeux et des doigts.
Ce livre cru bien mort, chose d’ombre et d’effrois,Sa résurrection « ne surprend pas le sage » ;Qui sait, ô Relieur, artiste ensemble et mage,Combien tu fais encore mieux que tu ne dois.
On le reprend, ce livre en sa toute jeunesse,Comme l’on reprendrait une ancienne maîtresseQue quelque fée aurait revirginée au point ;
On le relit comme on écouterait la MuseD’antan, voix d’or qu’éraillait l’âge qui nous point :Claire à nouveau, la revoici qui nous amuse. »
Les autres sujets étaient les suivants:BibliomanieBibliothèqueL’arrivée du catalogueEdition originale contemporaineDésappointementPauca mihiLes quaisBibliophobes (2 sonnets)Bibliotaphe (3 sonnets)Sous le titre de Biblio-Sonnets. Poèmes inédits, le recueil sous emboîtage ne parut qu’en 1913 chez H. Floury. Après une préface posthume de Pierre Dauze, datée du 11 janvier 1896, sont reproduites 20 lettres de Verlaine écrites entre le 12 octobre 1895 et le 7 janvier 1896, veille de sa mort. Le volume est illustré avec 1 vignette, 13 bandeaux et 14 culs-de-lampe gravés sur bois par le genevois Richard Ranft (1862-1931). Un tirage spécial était réservé aux membres de la Société « Les XX », fondée par Pierre Dauze en 1897.
Les sonnets trahissaient la commande, « épouvantables travaux forcés » écrit son biographe Alain Buisine, et le manque d’inspiration du poète. Pierre Dauze avait avoué à Verlaine : « les sonnets ne me donnent pas complète satisfaction ». Mais la poésie verlainienne est-elle compatible avec l’univers de la bibliophilie ?
Le poème autographe intitulé « Bibliophobes » (s.l., s.d., 2 p. in-8°), signé deux fois « Paul Verlaine » a été vendu 20 000 € en 2004. »
H
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Merci pour cet article, qui va ce pas enrichir ma liste d'ouvrages à consulter sur les écrits à propos de la bibliophilie 🙂
Cordialement,
Morgane.
Ce n'est pas le Verlaine flamboyant qui nous est présenté mais un artiste travaillant sur commande à des vers insuffisants (façon slogan). On doit lui reconnaître une certaine lucidité dans l'approche du métier de libraire " Aux malices ultimes
Qui ne vend pas trop cher pour vendre sûrement" !
Ô triste, triste était son âme… Pierre