De temps en temps, on croise chez les libraires, sur ebay ou dans une salle des ventes une des éditions de l’Index Librobrum Prohibitorum, soit l’index des livres interdits.
Mais de quoi s’agît il exactement? C’est malheureusement tout simple, il s’agît de la liste des ouvrages pernicieux que les catholiques romains n’étaient pas autorisés à lire, car ils représentaient un danger pour leur foi (en en détournant leurs lecteurs), et pour l’Eglise. Dans les nombreuses éditions, cette triste liste était souvent accompagnée des règles de L’Eglise concernant la lecture, la vente et la censure des livres.
L’objectif de cette liste était bien sûr d’interdire et d’empêcher la lecture de livres pouvant contredire les dogmes de l’Eglise, ou ceux critiquant l’Eglise. Finalement, au cours des siècles, comme on a pu le voir dans d’autres messages, l’index s’abattait également sur des livres dont la remise en question des dogmes n’était que très indirecte. Dès ses origines d’ailleurs, l’un des objectifs principaux de l’index était de contrecarrer les avancées du protestantisme.
Pour un livre, dans une Europe très catholique, la mise à l’index signifiait souvent un « arrêt de mort » puisqu’il pouvait par exemple être mis au bûcher.
C’est au 16ème siècle que le pape Paul IV publia le premier index. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que ce fût à la demande de l’Inquisition. Cette liste fût ensuite confirmée en 1564 au Concile de Trente aboutissant peu après à la création d’une Congrégation de l’Index (1571), chargée de remettre à jour la fameuse liste, d’elle même ou sur l’ordre du pape.
Ce que vous savez peut-être moins, c’est que l’Index fût régulièrement complété et mis à jour jusqu’en 1948, et la 32ème édition, qui contenait alors 4000 livres prohibés pour des raisons diverses (« hérésie », ce qui ouvre des possibilités assez larges, mais aussi immoralité, licence sexuelle, etc.). Des suppléments furent ajoutés jusqu’en 1961, avant la suppression de l’index par Vatican II en 1966.
En 1948, on y trouvait d’ailleurs encore des ouvrages de Sartre (son oeuvre intégrale, ce qui laisse rêveur) et Honoré de Balzac, aux côtés de Renan, Condorcet, Lamartine, Diderot, Rousseau, Descartes, De Foe, Copernic, Voltaire ou Freud…
Comme nous l’avons vu dans le message sur « De L’Esprit », d’Helvétius, la mise à l’index n’était pas une simple réaction, et il était recommandé aux auteurs de corriger et modifier leurs textes, une forme d’autocensure avant publication, pour éviter l’interdiction, ce qui n’est pas moins pernicieux.
Les divers textes sur l’index sont intéressants, on y apprend que la Congrégation de l’Index n’était qu’une administration comme une autre, avec ses nombreux dysfonctionnements. Finalement, on ne peut guère que contester ces listes dans la mesure par exemple, où l’on y trouve Rousseau et Sartre, mais pas Hitler ou Staline, ainsi que Edgar Bauer, désormais oublié, mais pas Bruno Bauer, qui contestait l’existence de Jésus Christ… Erreur de bureaucrate, ou pire? Ça fait presque penser aux critiques littéraires qui ne prennent pas soin de lire les livres qu’ils commentent… A noter qu’en plus de l’index publié par le Vatican, il n’était pas rare que des autorités catholiques locales mettent elles aussi des livres à l’index : ainsi dès 1544 la faculté de théologie de Paris publia chez Jean André, une liste de livres interdits, qui contenait 232 titres, dont Pantagruel et Gargantua de François Rabelais.
On retiendra enfin qu’il existe deux types d’index :
– L’index librorum expurgatorum (Index purgatoire): catalogue des livres dont la lecture est interdite;
– et l’index librorum expurgatorum (index expurgatoire): catalogue des livres dont la publication et la vente ne sera autorisée qu’après correction ou épuration.
Vous pouvez trouver une liste des livres mis à l’index de l’édition de 1948 en cliquant sur ce lien : http://www.cvm.qc.ca/gconti/905/BABEL/Index%20Librorum%20Prohibitorum-1948.htm
H
Images : Des pages de titre d’index, et le livre reprenant la liste des livres interdits par la Faculté de Théologie de Paris en 1544 (BNF).
Thank you for sharing with us, I believe this website truly stands out : D.
Voici un Index en vente aux States.
http://cgi.ebay.com/COPERNICUS-GALILEO-IN-THE-INDEX-OF-PROHIBITED-BOOKS_W0QQitemZ270206484268QQihZ017QQcategoryZ29223QQssPageNameZWDVWQQrdZ1QQcmdZViewItem
Par contre, la description du livre par le vendeur…
désolé pour les fautes. Message tapé à la vas-vite sur un ordi qui n’est pas le mien… panne d’adsl at home !!
Bertrand
a dede155,
effectivement une visite (la dernière car je connais bien la région du Bezu et du Razès…),
une belle visite d’ailleurs, de bon matin, presque à l’heure où le soleil se lève sur les derniers monts des corbières au loin…
L’ombre de l’abbé Saunière aidant, la part de mystère demeure intacte et ce n’est pas cette fois encore, hélas, que je percerai l’énigme de l’ascète !
Effectivement, Les secrets de Marie-Madeleine est un achat 100% ambiance Rennes-le-chateau, mais je dois confesser que je suis hérétique depuis bien plus longtemps puisque c’est tout d’abord l’Enigme sacrée et le Message de Lincoln et consorts que j’ai dévoré dans les années 80…
Sinon merci pour les compliments about bindings cela fait toujours plaisir et motive pour encore faire mieux… car je dois bien avouer que dans ce métier aussi il y de petits coups de mou…
Quid de Montolieu ? et bien, rien, car ma fille de 2 ans n’aurait pas supporter le voyage sur ces routes tortueuses voire tortureuses des corbières et de l’Aude… 8 vomis en 20 jours de vacances vous calmeraient un troupeau de bibliophile enfantophiles et mégalophages.
Amicalement, Bertrand
Hugues
Le Dr Gubler : une simple allusion ; si le monde religieux à perdu son index, le monde profane conserve le sien et dans ce cas précis d’une manière arbitraire ; mais c’est une autre histoire un peu hors sujet je l’avoue.
Bertrand : Alors que vous séjourniez au pays de Joe Bousquet,de Delteil, de Montfaucon de Villars, du père Castel (inventeur du clavecin oculaire) de Fabre l’alchimiste, voila que vous revenez les bras chargés d’ouvrages inspirés du Da Vinci Code !!!
Je subodore la visite d’un petit village dans le Razes aux effets secondaires effroyables.
Nonobstant ce péché mortel, les superbes livres et reliures que vous proposez réduisent la faute et permettent l’absolution 😉
Quid de Montolieu ?
Cordialement
Bertrand,
Merci pour le pti compliment!
Je crois me souvenir qu’il y avait eu un débat sur la censure sur le blog il y a un moment, et que finalement les censeurs en herbe se sont retirés sans même dire « bonsoir » (référence au coup d’éclat de Maurice Clavel). Sourire.
Votre parallèle avec Marie-Madeleine me rappelle les protestations, parfois violentes, qui eurent lieu lors de la sortie du film « La Dernière tentation du Christ »… Visiblement, tous n’étaient pas au courant de Vatican II. N’ayant pas vu le film, je m’abstiens de tout commentaire sur le sujet, mais vous savez ma position sur la censure (en dehors de la protection des mineurs.).
Dans tous les cas, il est intéressant de se pencher sur les rapports entre les religions et la littérature (et au sens plus large la pensée et l’art) : de l’index aux « fatwas » qui s’abattirent sur Salman Rushdie… Ca laisse songeur.
H
Dede… Je ne suis pas certain de bien comprendre ce que vient faire Gubler là dedans… mais bon? Sourire.
De l’influence de l’index sur la valeur commerciale d’un livre… Ca ferait un bon message.
Pas de bon de sortie pour vous Dede, désolé, il va falloir continuer à écrire des commentaires!
H
Bonjour à tous,
superbe article chef !
Je me permets de réagir à chaud, étant actuellement en train de lire un corpus de textes, disons… « hérétiques » sur Marie-Madeleine,
je fais le parrallèle entre la phrase de Hugues : « Des suppléments furent ajoutés jusqu’en 1961, avant la suppression de l’index par Vatican II en 1966. » et la vision de Marie-Madeleine par le Vatican à cette même date de 1966. Car c’est justement à cette même date, à ce même concile de Vatican II, que l’Eglise de Rome décide de ne plus considérer Marie-Madeleine, comme la pécheresse, la prostituée, la femme de mauvaise vertu, que nous avait dépeint l’Eglise depuis le plus profond Moyen-Age…
Ceci expliquant cela, ma remarque n’a rien d’hérétique en soit, et je saurais gré aux censeurs en herbe du blog de bien vouloir laisser le grill éteint, j’ai très chaud, merci.
Sur ce,
Amicalement, Bertrand
PS : Quand je pense à mon ami Cyclopède (cad mon ami Desproges) je me dis qu’heureusement qu’il est venu sur terre pour sa minute( … de M. cyclopède…) … après 1966…
Il n’y a pas que du mauvais pour ces livres mis à l’index.
Il font le bonheur des libraires….Trouvez moi donc un Vanini à prix abordable.
Je vais de ce pas dénicher le livre du Dr Gubler peut être dans quelques lustres fera t’il un carton ?
Bon ok Huges j’ai compris : Dede ==> Sortie.