Amis Bibliophiles bonjour,
Reconaissons-le, la lecture des livres sur les livres, quand ils sont de qualité, est l’un des plus grands plaisirs du bibliophile. L’offre semble pléthorique mais elle finalement assez limitée et il est toujours réjouissant de découvrir un nouvel ouvrage, qui lui-même, par sa lecture, ouvre de nouveaux horizons bibliophiliques.« Reliure Impériales, Bibliothèque Napoléonienne de Gérard Souham » par Anne Lamort, paru aux éditions Monelle Hayot est l’un de ces ouvrages. Ce magnifique grand in-4, abondamment illustré nous fait visiter la collection de Gérard Souham, et plus précisément ses reliures napoléoniennes. De Brienne à Sainte-Hélène, on découvre les ouvrages ayant appartenu à l’Empereur, ou reliés à ses armes, ceux des grands personnages du premier Empire, puis les ouvrages de Napoléon III et de ses contemporains.Comme le souligne Anne Lamort dans sa brillante introduction, « la singularité de la collection préentée dans cet ouvrage réside dans la motivation qui a présidé au choix des pièces. S’agissant de livres, les critères essentiels retenus d’ordinaire par les bibliophiles reposent tantôt sur le contenu des volumes (auteur, texte, édition), tantôt sur leur aspect physique (reliure, illustration, support). Pour les plus raffinés d’entre eux, ces deux aspects se conjuguent, donnant au livre toute sa spécifité comme symbole de la condition humaine par ses caractéristiques à la fois matérielles et spirituelles. Gérard Souham a, dès la genèse de sa bibliophilie si particulière, privilégié en plus de ses critères une dimensions affective souvent absente des grandes quêtes intellectuelles. Le dénominateur commun de tous les livres présentés ici et de la plupart des objets qui ornent le volume tient dans leur provenance singulière. Chacun a appartenu à un individu obscur ou célèbre, mais clairement identifiable ».
Ainsi si on croise des éditions magnifiques dans de somptueuses reliures, on découvre également une émouvante édition des Histoires des troubles de l’Amérique anglaise (Soulès, François, 1787, Paris, Buisson, 4 volumes in-8) dans une reliure en demi-basane très usagée qui tînt compagnie à l’empereur en exil à Saint-Hélène. Elle fait peut-être partie des 400 ouvrages choisis par un Napoléon à l’agonie, pour former une petite bibliothèque de base destinée à l’Aiglon.L’ouvrage se compose de deux grandes parties: le premier Empire. Cette partie présente des ouvrages lié au cercle restreint des proches de l’Empereur (Napoléon, Joséphine, Marie-Louise, l’Aiglon), puis les Napoléonides (de Joseph Bonaparte aux enfants Beauharnais en passant par Murat), les hauts dignitaires et ministres (de Cambacérès à Talleyrand, en passant par Fouché), les maréchaux ( de Berthier à Victor en passant Davout ou Suchet), et enfin les politiques et hauts fonctionnaires (militaires et société civile).
La seconde partie présente les ouvrages liés à Napoléon III, Eugénie et au prince Impérial, puis aux Napoléonides, aux maréchaux et à la société civile. L’ouvrage se termine par des reliures étrangères et une bibliographie très instructive.Quelques exemples: j’ai découvert avec plaisir une reliure portant le super-libris du Premier Consul, Lodigiani, le relieur italien de l’Empereur, et les ex-libris des plus grands personnages de l’époque.
Chaque ouvrage est présenté de façon très détaillée: image, biographie du propriétaire , description très complète et très précise de l’ouvrage.
On peut aisément passer quelques heures à contempler chaque page, à essayer par exemple de se souvenir qui était Murat pour relier l’ouvrage présenté au grand cavalier. Quelques objets sont également décrits, comme un inquiétant portefeuille de maroquin du cabinet noir de l’Empereur, et qui était destiné à transporter des copies des courriers que la police ouvrait et communiquait à Napoléon.
Au final, un ouvrage passionnant et qui constitue une source bibliographique importante sur un sujet encore peu traité: l’OHR comme le Guiguard se concentrent sur les reliures de l’Ancien Régime, et l’Armorial du Premier Empire de Révérend ne décrit pas les fers des reliures, alors que c’est le cas ici.
Ce travail remarquable effectué par Anne Lamort sur la bibliothèque Souham peut donc être considéré comme la première pierre de l’édifice qu’il faudra construire pour constituer une bibliographie spécialisée sur les marques de provenance du XIXème siècle, au moins pour les personnages liés au deux empires.
Je vous en conseille vivement la lecture.
H
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Je mets en vente sur ebay un exemplaire en très bon état, avec une petite mise à prix (30 euro), très prochainement.
1)Parution fin 2004, ISBN 2-903824-44-4
2)Pour Talleyrand, on trouve assez souvent des livres avec l'ex-libris gravé aux armes et à sa devise "Re que Diou" et la mention "Bibliothèque du château de Valençay"
Lauverjat
Merci Hugues,
Cela donne envie de le lire…
Un question au passage, à quoi ressemble un volume ayant appartenu à Talleyrand?
Lui qui vendit 3 (ou 4?) fois sa bibliothèque, je ne me souviens pas d'avoir croisé de volumes de sa provenance.
Mais il est vrai que ses armes ont dû être complexes à réaliser. 🙂
Olivier