Les filous du jour…. L’imprimerie clandestine à Paris au 18ème

Le croiriez-vous, le filon des filous s’épuise, et il devient de plus en plus difficile de trouver un contenu pour mon message du dimanche, que je consacre traditionnellement à ce sujet (idées bienvenues par email, si vous avez des pistes).

Il y a quelques jours j’évoquais les stratagèmes utilisés sur les pages de titre (fausses adresses, etc.) par les imprimeurs et libraires pour échapper au pouvoir en place quand il s’agissait de livres interdits. Etaient ce des filous, ou des escrocs? Oui, si l’on s’en tient à la loi, non, si on considère que les livres contrefaits et prohibés étaient totalement entrés dans les moeurs à cette époque.
Oui, enfin, carrément même, si on a besoin d’écrire un message dominical sur les filous du monde du livre ancien!

Si les livres prohibés faisaient partie du « quotidien » des lecteurs du 18ème, leur production n’était toutefois pas sans risques. Aussi, si les risques se limitaient à l’acheminement vers Paris depuis l’étranger pour les livres interdits(on connaît ainsi une filière depuis la Suisse, qui passait par Troyes), quand ces mêmes livres étaient imprimés à Paris, la pratique était plus dangereuse.
Ceci dit, une fois le livre imprimé, les risques diminuaient nettement et on comprend donc pourquoi malgré les difficultés, la tentation d’imprimer à Paris, au coeur du marché, était si forte. En effet, si l’impression était sans risque à La Haye ou Genêve, il n’était pas rare que les livres soient saisis aux portes de la capitale, entraînant une perte financière évidente pour le faussaire. Les filières pour « passer » en fraude ces livres aux portes de la capitale étaient d’ailleurs nombreuses : livres cachés dans des ballots de marchandises, dans des voitures à double fond, voire confiés à des valets de princes du sang… qui passaient évidemment aux portes sans être fouillés.

Dans Paris, le problème était d’imprimer. Les Anecdotes Typographiques, de Nicolas Contat nous renseignent : cela passait le plus souvent par la location d’une maison à double entrée dans un faubourg, avec un jardin donnant sur d’autres jardins, pour permettre une fuite éventuelle puis on se procurait papier et presse qu’il fallait introduire en cachette dans la maison. Le papier était souvent caché dans une boîte à perruques, ou une hotte de blanchisseuse, et on utilisait le même procédé pour « sortir » les ouvrages imprimés.
Malesherbes, le fameux Directeur du la Librairie, écrivît d’ailleurs dans son Mémoire sur la liberté de la Presse qu’il estimait le nombre de presses portatives permettant ce genre de travail à une centaine dans Paris, en 1788 : « des presse qu’on peut enfermer dans une armoire, avec lesquelles chaque particulier peut imprimer lui-même et sans bruit ». J’ignorais complêtement cela…

Des filous, certes, mais sans eux combien de livres n’auraient jamais existé!

Je vous rappelle que demain, à 20h15, une nouvelle énigme bibliophilique vous attendra sur le blog!

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Images : presses et imprimeurs au fil des siècles.nt cela/