Des Livres à l’honneur : Les « Livre à la Mode » de Caraccioli

Amis Bibliophiles Bonsoir,

A l’honneur ce soir, l’un des livres de ma bibliothèque que je préfère, une prouesse typographique : la trilogie de Caraccioli, le « Livre à la Mode » vert, le « Livre à la Mode » rouge, et « Le Livre de Quatre Couleurs ».

Louis Antoine Caraccioli (1719 – 1803) est écrivain français issu d’une branche cadette de la maison napolitaine des Caraccioli. Il entra chez les Oratoriens en 1739, séjourna quelque temps en Pologne, où il fit l’éducation du prince Rzewusky, puis revint à Paris, où il se livra tout entier aux lettres et vécut du produit de sa plume. Ruiné par la Révolution française, il reçut de la Convention, en 1795, une pension de 2000 francs.

On connaît les pages de titre imprimées en rouge et en noir, voir celles imprimées intégralement en rouge que Bertrand nous a présentée récemment… mais l’apport du marquis de Caraccioli à la bibliophilie est unique. Il est en effet à ma connaissance le premier (et le seul) à avoir proposé des livres entièrement en couleurs, et ce dès le milieu du 18ème siècle.
Ces ouvrages sont l’incarnation de l’esprit à la française du Siècle des Lumières et deviendront rapidement des succès auprès des beaux esprits, courtisans et autres petits-maîtres de la Cour.

En 1757, Caraccioli propose son premier « Livre à la Mode », publié « A Verte Feuille », par l’imprimerie du Printemps, au Perroquet, en « l’année nouvelle », qui est entièrement dans un beau vert émeraude.
Deux ans plus tard, en 1759, devant le succès de ce premier opuscule, Caraccioli récidive avec un deuxième « Livre à la Mode », imprimé intégralement en rouge vermillon/rose; puis avec un troisième « Livre à la Mode », imprimé entièrement en jaune. En 1760, il bouclera la boucle avec l’incroyable « Livre de Quatre Couleurs », « Aux Quatre Eléments, de l’imprimerie des Quatre Saisons, en 4444 ». Cette fois-ci l’ouvrage est imprimé en 4 couleurs : une préface en jaune orangé, une partie en bleu turquoise, une partie en marron, une partie en rouge écarlate, et une dernière partie en jaune orangé. L’ouvrage est un petit bijou, qu’il faut vraiment avoir tenu dans ses mains pour réaliser combien il est unique par rapport à toute la production typographique du 18ème.
De plus, le texte est lui aussi très agréable, et Caraccioli se moque d’ailleurs de lui-même et des modes dès le début, quand il souligne que vraisemblablement la couleur seule de ses ouvrages suffira à leur succès, dans une époque où l’on s’entiche de tout et de rien, sous les prétextes souvent les plus futiles. Il écrit également qu’il propose à ses lecteurs des livres qui leur ressemblent, colorés « … je vous offre (…) le plus beau des vermillons, tel enfin qu’il brille sur vos visages magnifiquement et furieusement enluminés »… Les ouvrages traitent en particulier de ces futilités qui caractérisent la vie d’une cour : on s’enflamme pour les éventails, on compare l’Etiquette, on démarre la partie imprimée en marron par une digression sur l’invention des toilettes, que l’on doit à deux singes du Serrail du Grand Seigneur, et tout ceci se termine par le testament du baron de Muscoloris, grand-petit maître de la Frivolité.
J’ai la chance de posséder trois des quatre ouvrages (vert, rouge et quatre couleurs), reliés dans un même volume. C’est un petit bijou que je ne me lasse jamais de lire et de contempler, et assurément l’une des prouesses typographiques et, osons le dire, marketing, du 18ème siècle. Souvent, j’essaie d’imaginer comment il fût accueilli dans ses salons par la Cour de Louis XV… probablement avec ferveur et délicatesse!
Voici quelques images. J’ai essayé de rendre les couleurs, pas simple…

H

116 Commentaires

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  4. J’ai le plaisir de posséder un petit ouvrage de Caraccioli. Il s’agit de : ‘Eloges historiques de Benoist XIV par le marquis de Caraccioli’ qu’il a publié chez Bassompierre, à Liège, en 1766.
    Cordialement à tous.

  5. J’ai le plaisir de posséder un petit ouvrage de Caraccioli. Il s’agit de : ‘Eloges historiques de Benoist XIV par le marquis de Caraccioli’ qu’il a publié chez Bassompierre, à Liège, en 1766.
    Cordialement à tous.

  6. J’ai le plaisir de posséder un petit ouvrage de Caraccioli. Il s’agit de : ‘Eloges historiques de Benoist XIV par le marquis de Caraccioli’ qu’il a publié chez Bassompierre, à Liège, en 1766.
    Cordialement à tous.

  7. J’en doute. Une déformation professionnelle, bien sûr, mais sans détails ni source, comment vérifier?

    Dans le catalogue de la BM Avignon on trouve un exemplaire de la version rouge (Rés. 532(2)) et un exemplaire de l’édition verte (Rés. 532(1)) avec la remarque: « Imprimé à l’encre verte, d’après le texte (p. VII). La couleur est aujourd’hui brun clair. »

    Il reste donc de l’espoir, me semble-t-il.

  8. Martin,
    J’ai lu quelque part que ce « Livre à la Mode » en jaune existait, mais je ne l’ai jamais vu non plus.
    Pour tout vous dire, je préfèrerais qu’il n’existe pas, ce qui signifierait que j’ai toute l’oeuvre en couleurs de Caraccioli.
    Quelqu’un en sait-il plus?
    Hugues

  9. Merci beaucoup pour cette autorisation spéciale!
    Cependant, je tiens à constater que je n’ai jamais écrit ni Derome ni Derôme sur ce blog.

    Je trouvais cette description par un membre de la LILA bien drôle et voulais partager mon amusement avec les lecteurs éclairés de ce blog, mais bon, le sens de l’humour allemand…

    Pour revenir aux livres en couleurs du marquis de Caraccioli, je dois avouer ne pas connaître le troisième Livre à la Mode, imprimé en jaune, et je serais très reconnaissant pour toute information là-dessus.

    Bien cordialement,
    Martin

  10. Bonjour Hugues,

    Depuis quand le blog du Bibliophile est-il devenu le blog de la Bibliophilie ? J’ai dû manquer un épisode.

    Jean-Paul

  11. Il est vrai Hugues que le propos mérite d’être approfondi.

    Voici ce qu’écrit Pierre Larousse dans son Grand Dictionnaire Universel du XIXè siècle à propos du Marquis de Caraccioli (1715-1789) :

    « (…) Caraccioli avait un homonyme qui écrivait avec une déplorable facilité et qui était encore plus ennuyeux que ses livres. Pour éviter la confusion on avait pris l’habitude lorsqu’on présentait l’ambassadeur dans une maison de crier : « Ce n’est pas lui ! » « (P. Larousse, III, 348-4)

    Alors lequel est-ce ?
    Qui a produit ce livre à la Mode ?
    Merci d’avance des détails.

    Amitiés, Bertrand

  12. Bonsoir Dédé, c’est bien le même… Il a également commis :
    Caractère de l’amitié
    Conversation avec soi-même
    Jouissance de soi-même
    De la Grandeur d’âme
    Tableau de la mort
    De la gaieté
    Langage de la raison
    Langage de la religion
    Religion de l’honnête homme
    Le Chrétien du temps
    Diogène à Paris
    Le Livre à la mode
    Vraie manière d’élever les princes
    Dictionnaire pittoresque et sententieux
    Vie de Clément XIV
    Lettres intéressantes du pape Clément XIV, prétendues trad. de l’italien et du latin, 4 volumes in-12, Paris, 1777.
    H

  13. Autorisation spéciale pour Martin, qui a le droit d’écrire Derôme au lieu de Derome… En effet, Martin est allemand, mais il parle si bien français que vous ne l’aviez pas remarqué!
    (c’est vrai).
    Hugues

  14. Bertrand : Comme quoi, à force d’employer le terme « originale » à tort et à travers en bibliophilie, on voit bien que ça ne veut plus rien dire… Vous en conviendrez…

    Jean-Marc :
    Jaune…? Je sais pas, mais une expression me revient en mémoire, j’ai déjà entendu l’expression « jaune cocu »… mais d’où ça vient, je ne sais.

    Hugues : beau livre!

    Antoine

  15. La vie n’est que « crises » alors…

    Puisqu’il n’en faut plus qu’une pour mourir…

    Ouah !! On deviendrait presque des Gens de Lettres à fréquenter ce blog !

    Amitiés en crises, Bertrand

  16. Non Bertrand, qu' »une crise » : c’est comme passer « de la bibliophilie à la bibliomanie » ! (Nodier)

    Jean-Paul

  17. A propos de livre sur papier de couleurs, il existe un ouvrage de Albert de Rochas d’Aiglun, « Le Livre de demain », Blois, Raoul Marchand, 1884, imprimé sur 46 sortes de papiers différents, dont de nombreux papiers de couleurs. Je n’ai malheureusement jamais vu cet ouvrage.

    Toujours sur les livres de couleurs, j’ai acheté une petite « Physiologie du prédestiné. Considérations biscornues, par une bête sans cornes. », Paris, Raymond-Bocquet, 1841, qui a aussi paru sous titre plus explicite de « Physiologie du cocu ». C’est un exemplaire imprimé sur papier jaune, relié en demi maroquin jaune. J’espère qu’un des lecteurs si savants de ce blog saura m’expliquer pourquoi le choix de cette couleur jaune (sourire !)

    Jean-Marc

    PS : J’ai annulé mon message précédent car, en le relisant, je me suis aperçu que j’avais mis « Physiologie du mariage » au lieu de « Physiologie du cocu ». Sans commentaire.

  18. Pour répondre à Tristan concernant ma mention de l’exemplaire de la Librairie T. à Paris sus-nommé, je précise que j’ai écris « reliure originale » et non « reliure de l’époque ». Une reliure peut être une « reliure originale » et être postérieure… originale dans le sens atypique, qui sort de l’ordinaire…

    Voilà, c’était juste une précision linguistique…

    A force de parler d’original, d’originale ou d’EO on en oublierait presque que d’être original c’est avant tout être singulier, unique, innovant !

    Bonne soirée les cazinophiles !!

    Amitiés, Bertrand

  19. Bonsoir Martin

    Quatre remarques :
    – ce n’est pas une édition de Cazin, mais de Valade.
    – le format n’est pas in-12, mais, a priori (il faudrait avoir les exemplaires en mains) in-18.
    – Derome ne prend pas d’accent circonflexe sur le « o ».
    – le prix est le prix d’un maroquin du XVIIIe, pas d’un petit format de cette époque.

    Jean-Paul

  20. La veuve du libraire Nicolas-Bonaventure Duchesne (qui a exercé de 1743 à sa mort en 1765), Marie-Antoinette, fille du libraire André Cailleau, n’était que libraire et a succédé à son mari,de 1765 à sa mort arrivée en 1793, rue Saint-Jacques, à l’enseigne du Temple du Goût.
    Personne ne semble s’être intéressé à l’imprimeur du Livre à la mode.

    Jean-Paul

  21. En effet, l’imprimeur a joué un rôle important en rendant possible le rêve de Caraccioli. Pour ce que j’en sais, le livre aurait été imprimé par la Veuve Duchesne.
    H

  22. Hugues,

    N’oubliez-vous pas le principal artisan de cette curiosité typographique : l’imprimeur ? Qui était-ce ? (On dit que le libraire-éditeur est Bonaventure Duchesne).

    Jean-Paul

  23. Bertrand, vous faites erreur, la reliure de Teissèdre est postérieure. Mais belle quand même…
    Si ça se trouve l’ex propriétaire qui l’a fait relier au début du 19ème n’aimait pas ses exemplaires brochés…. Qu’en penser alors?
    Sourire
    Tristan

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